Cinéma : « Ombres et Lumières » par Olivier Nolin

Publié le : 24 avril 2019

Sortie en salles / 9 janvier 2018.
Disponible en D.V.D.

Quatre histoires d’amour, « brûlantes comme un poème baudelairien ». L’ensemble parvient à nous troubler, malgré quelques afféteries. « Ombres et Lumières » est une suite de tableaux qui illustrent le caractère déroutant de la prostitution occasionnelle. Il nous parle des « naufragés de l’amour, ceux qui n’embrassent que des ombres et n’ont que l’ombre du bonheur » (Shakespeare).

Avec ses échos, ses correspondances, ses symétries multipliées à plaisir comme une partition de musique de chambre où domine une atmosphère de voluptueuse torpeur, le film évoque « quatre histoires d’amour passionnées » où la part d’ombre souligne la lumière des âmes.

La complexité et la diversité des situations s’illustrent souvent par le silence, la rareté des dia-logues et l’économie des mots. Cela permet aux acteurs de faire corps avec les personnages. Finalement, c’est la musique qui finit bien souvent par répondre aux dialogues. La magnifique réinterprétation des « Quatre Saisons » de Max Richter est un des beaux extraits du film.

Quatre histoires, de 20 minutes chacune, forment un ensemble où les très jeunes héros et héroïnes de ces rencontres amoureuses cherchent un bonheur presque impossible à atteindre parce qu’ils s’imaginent le plus souvent qu’il est plus facile d’obtenir de l’autre ce que chacun voudrait pour soi-même.

Relations intimistes paroxystiques et tumultueuses où le bien, le mal, la mort et l’amour se côtoient pour s’unir parfois étrangement. Unité de temps et de lieu où recherche d’absolu, insouciance et fureur d’aimer entrouvrent la porte sur la pénombre des personnages.

« Ombres et Lumières » révèle des corps, filmés avec une grâce picturale, qui transcendent le thème de la prostitution de manière quasi mythologique. Si l’ensemble se dilue parfois dans un « syncrétisme fouillis », où se croisent le pacte faustien, l’exorcisme libérateur ou l’amour saphique, l’ensemble parvient à séduire par la manière dont il investit les espaces clos, accordant aux étreintes les tons fauves qui leur conviennent ou des couleurs plus froides sur fond de déchirements.

Tant que le monde sera monde, peuplé d’humains inhumains, la joie amère d’aimer et l’irrépressible désir d’y céder pourront-ils justifier toute forme d’existence sur terre ? On cherche la traduction en images « des divans profonds comme des tombeaux ». L’amour physique seul est sans issue. Comment attirer ombres et lumières vers plus de… Lumière ? En hommage à tous celles et ceux qui « errent dans la nuit ». A ne pas manquer.