Crimes de la Vallée de Brumadinho : les cris et la clameur de la terre et des pauvres

Published : 20 February 2019

Même à la lumière du jour, le méfait de la tyrannie devient chaque fois, plus fort, et dans cette vallée du Nord, vallée de destruction, vallée de boue, il continue à enterrer des vies sur son chemin. Enterrant Brumadinho, enterrant Marielle, enterrant MARIANA (Bertin di Carmelia, Marabá/Pará – 26/01/2019).

Le crime à l’égard de l’environnement survenu à Brumadinho, commune située dans la région métropolitaine de Belo Horizonte, propage dans les rues et les villes les cris des hommes et des femmes, des habitants de la Maison Commune, violés dans leurs droits. La tragédie criminelle causée par la rupture du barrage de l’entreprise minière Vale a provoqué la mort de centaines de personnes, et avec elles, de leurs familles respectives, en plus de la dégradation et de la dévastation des villages, des rivières, de la faune, de la flore, des montagnes, des forêts, des réserves d’eau, des patrimoines historiques et culturels.
Avec un sentiment de solidarité et de partage, Luciana et moi, avec cinq autres membres de la Pastorale Nationale de rues, nous avons visité Brumadinho dans l’après-midi de dimanche dernier. Douleur et agonie quand nous arrivons sur place, où on voit beaucoup de tristesse. Il est très douloureux de voir la boue des résidus du barrage et de savoir combien de personnes ont déjà été retrouvées, ou sont encore cachées et disparues, peut-être sans jamais sortir de là. Il y a une vallée de larmes face à la situation, dans le regard des gens qui rendus silencieux par la douleur attendent la réponse et la force de comprendre la destruction, la boue, les vies détruites. La ville en deuil, dans le silence et la tristesse, est embrassée dans les prières et les veillées. Dans l’église de São Sebastião toujours pleine de gens pour prier et donner un mot de réconfort à ceux qui arrivent, nous trouvons Mgr Vicente Ferreira qui accompagne de près les souffrances provoquées par la tragédie et ne quitte pas le seuil de l’église. Il prie et parle aux proches des victimes, comme un berger, il écoute et dialogue pour ressentir la douleur de l’autre. Le prêtre verse ses larmes et cherche appui avec les fidèles tristes qui se lamentent en nous disant le grand « vide » d’une église qui pleure la mort des ministres, des chanteurs, des catéchistes... “de ceux qui étaient les gens de notre église.”

La ville de Brumadinho a célébré ses 80 ans le 17 décembre 2018, sans savoir qu’un peu plus d’un mois plus tard elle passerait par une telle tragédie. Le risque est devenu réel, provoqué par la négligence, la cupidité, le mépris causé par une politique économique de profits débridés en faveur des grandes sociétés minières, toujours en mesure d’exploiter, dévorer et détruire, en vue de s’enrichir au détriment de la classe ouvrière dans notre pays

Brumadinho est une commune brésilienne du sud-est du Brésil, située dans l’État du Minas Gerais. La population estimée en 2018 était de 39 520 habitants. En 2019, le 25 janvier sera la mémoire qui marque pour l’éternité la mort et la disparition de nombreuses personnes dans cette rupture du barrage de la société Vale S.A. D’après les chiffres de la tragédie communiqués, il y a 534 noms, dont 168 morts confirmées -134 morts identifiés, 182 disparus et 192 sauvés.

Ce jour-là, Brumadinho a connu la plus grande tragédie de son histoire, la perte de familles entières, d’amis, de personnes qui faisaient partie de l’histoire de cette petite ville, qui a brutalement enregistré le taux le plus élevé de morts et de disparitions de toute son histoire.
C’est aussi le temps de prier et de s’engager pour ne pas oublier Brumadinho, Mariana, la rivière Paraopeba, la rivière São Francisco... Il est temps de s’associer aux clameurs de la terre et de la justice dans les interventions sur les ressources naturelles, de sorte que les intérêts des grands groupes économiques ne prédominent pas mais que prévale la dignité humaine et la défense des biens de la création qui VAUT la VIE

Les sœurs Solange Damião et Luciana Souza

Pour nous aider à réfléchir, suit en annexe le texte de D. Joaquim Mol, évêque auxiliaire de l’archidiocèse de Belo Horizonte

Les compagnies minières blessent l’humanité

Les richesses de l’Etat de Minas Gerais, ses minerais et tant d’autres merveilles, qui nous ont été données si généreusement par le Créateur, se sont transformés en malheur. Minas voit décimées, gravement et rapidement, ses rivières et leurs affluents, ses lacs, ses terres agricoles, ses communautés et leurs cultures. Des crimes sont commis contre la vie humaine, contre le milieu ambiant et contre le droit de vivre en communauté et en famille.
Dans l’encyclique Laudato Si, le pape François nous alerte sur l’urgente nécessité de comprendre que la Planète agonise et crie contre le mal que nous provoquons à cause d’un usage irresponsable et de l’abus des biens que Dieu y a mis.
Ce qui a été légué aux hommes pour qu’ils prospèrent et vivent une vie comblée et la transmettent aux générations futures, l’action irrémédiablement gourmande et criminelle des compagnies minières le détruit en très peu de temps. Nous sommes face à la faible régulation de ce secteur par le Législateur, rempli de personnes financées par ces entreprises et autorisées par l’Exécutif, avec des interférences d’intérêts multiples, pas toujours républicains et peu fiscalisés par les organismes qui existent pour cela. Ajoutez à cela une justice indulgente, centrée sur elle-même, très onéreuse, insensible, prétentieuse et divorcée du peuple brésilien. Il en a été de même à Mariana, à, cause de Vale/Samarco, jusqu’à aujourd’hui « en justice », et c’est comme cela à Brumadinho, à cause de Vale. Nous ne pouvons pas laisser cela continuer. Ce n’est pas un accident qui s’est produit en Minas Gerais. C’est un crime contre l’environnement et un homicide collectif. Un massacre de personnes, d’animaux et du milieu ambiant. Ils ont presque tué aussi l’espérance, la foi, la dignité et l’amour des personnes qui ont survécu, qui maintenant souffrent terriblement, mais sont dans un processus de soin, de reconstruction, d’édification, de revitalisation et reprise de possession de leur dignité courageuse. Comme il ne s’agit pas d’une entreprise minière abstraite, les gens qui y travaillent et qui ont la responsabilité de cette tragédie doivent être punis rigoureusement, de sorte que, avec la compagnie minière, ils ne tombent pas aussi dans la honte, ceux qui exercent les pouvoirs susmentionnés et déjà si peu accrédités. Consciemment, les compagnies minières choisissent, parce qu’ils sont moins chers, des modèles d’exploration/exploitation du minerai de fer et d’autres métaux, plus nocifs pour l’environnement et pour la vie humaine.
Un profit exorbitant, presque illimité, avec un faible retour à la société via les pouvoirs publics, est le seul critère qui préside, avec inconséquence, aux décisions en relation avec les modèles d’exploitation des ressources naturelles.
En raison de cette soif insatiable et folle de richesses toujours plus grandes, “que la mite et la rouille détruisent et les voleurs dérobent”(Mt 6,19), toujours plus concentrées dans les mains de moins de personnes, les entreprises maintiennent les travailleurs dans la pauvreté à vie et exposés à la mort. L’exploitation minière dans notre pays est devenue insoutenable au point de vue éthique, calamiteuse et à très haut risque pour la vie humaine et toute la vie existant dans ses domaines d’activité.

La dimension cruelle et la puissance nocive de ces crimes récurrents nous indiquent que seul le fait de ne pas être dans un contexte de conflit armé les distingue d’être compris comme des crimes de lèse-humanité.
Finalement, les pratiques de ces délinquants sont systématiques, résultent de risques dont la clarté est évidente et de dommages d’actes inhumains et lâches contre la population civile.
C’est pourquoi il est urgent que les personnes, les organisations et les institutions qui valorisent la vie humaine, qui veulent défendre la nature contre cette destruction progressive et suicidaire, se rebellent contre ce modèle d’affaires qui enrichit si peu de personnes en détruisant la vie de tant d’autres. A la manière dont elle est pratiquée, cette économie tue, je cite le pape François, le meilleur dirigeant humanitaire du monde actuel.

La persistance de ce modèle économique d’enrichissement par la destruction est inadmissible. Il est impossible de continuer à accepter la destruction systématique de la nature, œuvre première de Dieu. Et que des milliards de travailleurs, de personnes âgées et d’enfants, de femmes et de jeunes, surtout les plus pauvres et les plus humbles, soient quotidiennement exposés au risque de mourir en raison d’une cupidité déplorable.
Comme le pape François dont le nom est inspiré de celui de Saint François d’Assise, « exemple par excellence de qui prend soin de ce qui est fragile et de l’écologie intégrale, vécue avec joie et authenticité » (Laudato si) nous y appelle, nous avons besoin, peut-être comme jamais auparavant, d’un débat qui unisse tout le monde, parce que le défi environnemental nous concerne tous et a un impact sur nous tous.
(Texte de Mgr Joaquim Giovani Mol, le vendredi 25 janvier 2019)Pour nous aider à réfléchir, suit en annexe le texte de D. Joaquim Mol, évêque auxiliaire de l’archidiocèse de Belo Horizonte

Les compagnies minières blessent l’humanité

Les richesses de l’Etat de Minas Gerais, ses minerais et tant d’autres merveilles, qui nous ont été données si généreusement par le Créateur, se sont transformés en malheur. Minas voit décimées, gravement et rapidement, ses rivières et leurs affluents, ses lacs, ses terres agricoles, ses communautés et leurs cultures. Des crimes sont commis contre la vie humaine, contre le milieu ambiant et contre le droit de vivre en communauté et en famille.
Dans l’encyclique Laudato Si, le pape François nous alerte sur l’urgente nécessité de comprendre que la Planète agonise et crie contre le mal que nous provoquons à cause d’un usage irresponsable et de l’abus des biens que Dieu y a mis.
Ce qui a été légué aux hommes pour qu’ils prospèrent et vivent une vie comblée et la transmettent aux générations futures, l’action irrémédiablement gourmande et criminelle des compagnies minières le détruit en très peu de temps. Nous sommes face à la faible régulation de ce secteur par le Législateur, rempli de personnes financées par ces entreprises et autorisées par l’Exécutif, avec des interférences d’intérêts multiples, pas toujours républicains et peu fiscalisés par les organismes qui existent pour cela. Ajoutez à cela une justice indulgente, centrée sur elle-même, très onéreuse, insensible, prétentieuse et divorcée du peuple brésilien. Il en a été de même à Mariana, à, cause de Vale/Samarco, jusqu’à aujourd’hui « en justice », et c’est comme cela à Brumadinho, à cause de Vale. Nous ne pouvons pas laisser cela continuer. Ce n’est pas un accident qui s’est produit en Minas Gerais. C’est un crime contre l’environnement et un homicide collectif. Un massacre de personnes, d’animaux et du milieu ambiant. Ils ont presque tué aussi l’espérance, la foi, la dignité et l’amour des personnes qui ont survécu, qui maintenant souffrent terriblement, mais sont dans un processus de soin, de reconstruction, d’édification, de revitalisation et reprise de possession de leur dignité courageuse. Comme il ne s’agit pas d’une entreprise minière abstraite, les gens qui y travaillent et qui ont la responsabilité de cette tragédie doivent être punis rigoureusement, de sorte que, avec la compagnie minière, ils ne tombent pas aussi dans la honte, ceux qui exercent les pouvoirs susmentionnés et déjà si peu accrédités. Consciemment, les compagnies minières choisissent, parce qu’ils sont moins chers, des modèles d’exploration/exploitation du minerai de fer et d’autres métaux, plus nocifs pour l’environnement et pour la vie humaine.
Un profit exorbitant, presque illimité, avec un faible retour à la société via les pouvoirs publics, est le seul critère qui préside, avec inconséquence, aux décisions en relation avec les modèles d’exploitation des ressources naturelles.
En raison de cette soif insatiable et folle de richesses toujours plus grandes, “que la mite et la rouille détruisent et les voleurs dérobent”(Mt 6,19), toujours plus concentrées dans les mains de moins de personnes, les entreprises maintiennent les travailleurs dans la pauvreté à vie et exposés à la mort. L’exploitation minière dans notre pays est devenue insoutenable au point de vue éthique, calamiteuse et à très haut risque pour la vie humaine et toute la vie existant dans ses domaines d’activité.

La dimension cruelle et la puissance nocive de ces crimes récurrents nous indiquent que seul le fait de ne pas être dans un contexte de conflit armé les distingue d’être compris comme des crimes de lèse-humanité.
Finalement, les pratiques de ces délinquants sont systématiques, résultent de risques dont la clarté est évidente et de dommages d’actes inhumains et lâches contre la population civile.
C’est pourquoi il est urgent que les personnes, les organisations et les institutions qui valorisent la vie humaine, qui veulent défendre la nature contre cette destruction progressive et suicidaire, se rebellent contre ce modèle d’affaires qui enrichit si peu de personnes en détruisant la vie de tant d’autres. A la manière dont elle est pratiquée, cette économie tue, je cite le pape François, le meilleur dirigeant humanitaire du monde actuel.

La persistance de ce modèle économique d’enrichissement par la destruction est inadmissible. Il est impossible de continuer à accepter la destruction systématique de la nature, œuvre première de Dieu. Et que des milliards de travailleurs, de personnes âgées et d’enfants, de femmes et de jeunes, surtout les plus pauvres et les plus humbles, soient quotidiennement exposés au risque de mourir en raison d’une cupidité déplorable.
Comme le pape François dont le nom est inspiré de celui de Saint François d’Assise, « exemple par excellence de qui prend soin de ce qui est fragile et de l’écologie intégrale, vécue avec joie et authenticité » (Laudato si) nous y appelle, nous avons besoin, peut-être comme jamais auparavant, d’un débat qui unisse tout le monde, parce que le défi environnemental nous concerne tous et a un impact sur nous tous.

(Texte de Mgr Joaquim Giovani Mol, le vendredi 25 janvier 2019)