« La Permission » par Soheil Beiraghi

Publicado el : 24 de diciembre de 2018

Sortie en salles / 28 novembre 2018

D’après une histoire vraie. Afrooz (Baran Kosari) est la capitaine de l’équipe féminine de futsal en Iran. Après onze ans de travail acharné, son rêve devient réalité : l’Iran est en finale de la Coupe d’Asie des nations. Mais au moment d’embarquer pour la Malaisie, elle apprend que son mari lui interdit de sortir du territoire. En Iran, une femme doit obtenir l’autorisation de son mari pour pouvoir voyager. Nous sommes en l’an 2015.

« La Permission », titre révélateur car il évoque l’infantilisation des femmes qui ne peuvent décider par elles-mêmes, dévoile le contraste d’un pays moderne, ultra-connecté et tourné vers l’avenir, mais qui repose malgré tout sur des lois inégalitaires. Portrait d’une femme qui décide de se battre pour défendre ses droits, le film se fait le témoin des vents contraires qui agitent l’Iran, entre modernité et traditions.

Récit d’une confrontation entre un époux et sa femme, entre la loi et la vie quotidienne, ce second film du réalisateur Soheil Beiraghi fait partie de ces productions intelligentes car impar-tiales, qui cherchent à montrer, à expliquer plutôt qu’à orienter. Sa caméra suit les person-nages dans leur intimité, révélant la différence entre la liberté intérieure et le masque porté à l’extérieur.

La force du film est de ne pas être une démonstration politique, mais d’abord un drame intime. Le personnage du mari échappe à la caricature du patriarche autoritaire et rétrograde. C’est un bel homme, présentateur télé, mais aussi un homme blessé utilisant un moyen de pression que lui offre la loi pour retenir sa femme. Soheil Beiraghi joue parfaitement sur la subtilité des enchaînements et l’absurdité de certaines situations.

Présenté à l’heure des mouvements #MeToo et #Time’Up, le film prend des accents universels lorsque le personnage interprété par Baran Kosari se heurte à un ennemi inattendu : l’habi-tude. Et un profond sentiment de résignation. Confrontée à la justice, au manque de solidarité entre femmes et finalement à des mécanismes mentaux datant de plusieurs millénaires, elle personnifie les perdantes des sociétés patriarcales.

« La Permission » a le mérite de relancer le débat sur les limites des droits des femmes en Iran, et les abus qui en découlent. En 2018, des députés ont ainsi proposé d’assouplir la loi pour les femmes ayant une carrière sportive, artistique ou politique. Afrooz (Baran Kosari) a peut-être perdu une bataille, mais elle a lancé ses compatriotes sur le chemin de la guerre. C’est aussi ça le cinéma. Un film sorti sur les écrans iraniens en 2017.

Sœur Hélène Feisthammel