Italie : Où en es-tu de ta thèse ?
Cette question est parvenue à mes oreilles pendant des années, jusqu’à devenir un sujet tabou… Mais le 6 octobre dernier, elle a enfin pu avoir une réponse : non seulement la thèse était finie mais elle était aussi soutenue !
Dans une petite salle de la faculté d’Histoire de l’Église de la Grégorienne, à Rome, entourée par mes Sœurs venues de presque toute la Province (étant donné que quelques jours après, Sr Federica faisait profession à Rome), j’ai discuté ma thèse qui a pour titre : « Vous n’êtes pas moniales mais seulement chrétiennes » (Paroles prononcées par un évêque durant une visite pastorale dans la seconde moitié du XVI siècle devant des sœurs qui vivaient en communauté mais sans clôture). Les tertiaires dominicaines à Sienne du XIII au XVII siècle.
Ma recherche a commencé dès mon noviciat. On étudiait des saintes et des bienheureuses, la plupart d’entre elles tertiaires et je me demandais : et les autres ? Qui étaient-elles ? Que faisaient-elles ?
A la fin du XIIIème siècle, des groupes de femmes dévotes se forment autour des couvents dominicains ; elles portent l’habit dominicain sans toutefois devenir membres de l’Ordre. On les appelait de différentes façons mais le terme commun à toutes était celui de “Pénitentes”. Cette expression se référait à tous ces laïcs, hommes et femmes, qui entre le XIIème et XIIIème siècle décidèrent de vivre l’évangile de manière radicale en imitant le Christ pauvre et en portant un habit spécifique, signe concret de cette conversio. Les Pénitents vivent seuls (ermites ou reclus) ou en communauté, travaillant et souvent au service des pauvres ; parmi ceux-ci, il faut compter S. François d’Assise en ses débuts. Bien que différente, l’expérience féminine pourrait se rapprocher de celle des Béguines.
L’Ordre de la Pénitence dominicain fut essentiellement féminin ; il a été étudié du point de vue des processus institutionnels qui aboutirent à l’approbation de la règle (1405) et de l’hagiographie, c’est-à-dire de la vie des saintes et des bienheureuses. Mais ces études ne rendent pas toujours compte de ce que fut la vie réelle des tertiaires, c’est pourquoi j’ai voulu observer de plus près l’expérience historique réelle d’un groupe de Pénitentes (la vie interne ainsi que les activités religieuses et sociales), les Mantellate de Sienne, des origines, et donc de la seconde moitié du XIII siècle, époque des premières prises d’habit, jusqu’au XVII siècle. Après la période de la plus grande expansion au cours du XIV siècle, qui correspond à l’expérience de Catherine de Sienne, le groupe des Mantellate connut un déclin au siècle suivant. Entre 1479 et 1482, une partie d’entre elles décida de commencer à vivre ensemble – auparavant, chacune vivait dans sa propre maison – créant ainsi des monastères ouvert, qui suite aux dispositions tridentines, durent, non sans résistance, accueillir la clôture en 1626.
Au terme de ces longues années de recherche et d’écriture, j’ai découvert dans les tertiaires dominicaines, la racine de notre vie apostolique féminine : des femmes désireuses de suivre le Christ et qui, mis à part quelques exceptions, n’étaient pas particulièrement charismatiques ; des femmes qui vivaient du travail de leurs mains et ne faisaient pas que prier ; elles vivaient en communauté mais n’étaient pas séparées du monde, à tel point qu’elles ont pu résister pendant des décennies à l’imposition de la clôture.
Sr Annalisa Bini
a_che_punto_e_la_tua_tesi.docx (15.5 ko)
20 décembre 2016