Italo-Suisse : Prière ouverture du chapitre provincial 2016
« Le royaume des cieux est encore semblable à un marchand qui cherchait des perles fines. Ayant trouvé une perle de grand prix, il s’en est allé vendre tout ce qu’il avait, et l’a achetée. » (Mt 13,45-46)
Avec le temps de prière de ce matin, nous entrons dans la célébration de notre XVIIIè chapitre provincial. Nous voulons le remettre dans les mains du Seigneur pour qu’il bénisse notre travail, nos réflexions, nos décisions.
Nous allons commencer comme chaque matin, avec « l’intonation » Seigneur ouvre mes lèvres. Et ma bouche publiera ta louange. En le demandant de façon particulière au début de cet office, il s’agit de demander au Seigneur qu’au cours de ce chapitre chacune de nous sache trouver la tonalité et l’expression qui soient en syntonie avec ce que le Seigneur veut dire à travers nous. Notre parole doit être prophétique, c’est-à-dire celle que Dieu nous donne pour notre assemblée.
Et pour cela nous allons raviver le don que Dieu nous fait de son Esprit Saint que nous invoquerons par le chant : souffle imprévisible
La lecture de l’Évangile de la Messe de ce jour est la version matthéenne de l’Évangile de Luc entendue dimanche dernier. On y présente la charte du prédicateur de la Bonne Nouvelle, de celui qui est mandaté pour annoncer le Royaume des Cieux : « strada facendo, predicate, dicendo che il Regno di Dio è vicino ». Un peu plus loin dans l’Evangile, Mt consacre tout un chapitre à creuser ce qu’est ce Royaume des Cieux et comment l’annoncer. Nous en lisons un tout petit extrait sur lequel nous méditerons.
"Le royaume des cieux est encore semblable à un marchand qui cherchait des perles fines. Ayant trouvé une perle de grand prix, il s’en est allé vendre tout ce qu’il avait, et l’a achetée." (Mt 13,45-46)
Cette parabole tient en deux petites phrases. C’est sans doute la plus courte des paraboles, tellement simple et limpide dans son expression. Et pourtant quelle profondeur dans cette simplicité !
Je la resitue dans son contexte : il faut aller au 1° verset de ce chapitre 13. On nous dit que Jésus sort de chez lui, de sa maison. C’est en soi bien banal mais comment ne pas y entendre un écho de l’appel que l’Eglise et l’Ordre ne cessent de nous lancer en ce moment : sortir de « son chez soi », pour aller à la rencontre de l’autre.
Où va donc Jésus ? Il se rend au bord de la mer. On peut imaginer qu’il médite face à la mer, dans le silence ; qu’au-delà de ce qu’il voit, son regard est tourné vers le Père et qu’en même temps il porte l’humanité en son cœur. Le point de rencontre entre son Père et l’humanité, c’est le Royaume des Cieux dont il va parler.
Au bord de la mer, il est rejoint par la foule, elle aussi sortie de chez elle, à la recherche de quelque chose, peut-être ne sachant pas très bien quoi ! Jésus monte dans une barque et s’assied ; il est maintenant face à la foule, tout à la fois proche et distant.
C’est de là qu’il va enseigner dans un discours comprenant 7 paraboles sur le Royaume dont la nôtre. Mt précise : Il leur dit beaucoup de choses en paraboles. Il n’insiste pas tant sur le beaucoup de paraboles mais le « beaucoup de choses » à travers les paraboles. A nous de savoir les découvrir en les méditant l’une après l’autre et jour après jour.
Si Jésus propose cette série de paraboles sur le Royaume c’est que c’est central dans sa prédication, dans sa mission. Ne nous a t-il pas appris à redire chaque jour « que ton Règne vienne » dans la prière du Notre Père, qui comprend aussi 7 demandes ? Le Royaume de Dieu nous remet devant notre quête fondamentale : « cherchez d’abord le Royaume de Dieu et tout le reste vous sera donné par surcroit ». En ce début de chapitre, c’est la quête du Royaume des Cieux qui doit nous mettre en marche. Donc pas d’abord nos intérêts personnels ou même communautaires et provinciaux mais le Royaume de Dieu que nous voulons construire avec le Christ.
La parabole de la perle est la 6° des paraboles. Ceux qui ont écouté ont avancé dans la compréhension du message de Jésus qui a pris le temps de bien expliquer. Jésus s’adresse maintenant aux seuls disciples ; la scène se passe de nouveau à la maison.
Le Royaume des Cieux est semblable à un marchand… Quelles sont les qualité du marchand : connaisseur des produits recherchés pour être revendus par la suite ; la capacité de distinguer le vrai du faux, l’honnêteté, la fiabilité et sans doute d’autres encore…
Marchand qui cherche des perles fines. Il n’attend pas que le travail soit fait par un autre. Il investit de son temps, de son énergie. Sa recherche le mobilise complètement.
Dans sa recherche, il trouve plusieurs de ces perles fines mais il mise sur une seule et pour cette unique perle, il accepte de tout vendre. Geste de grande radicalité non pas parce qu’il est inconscient mais précisément parce qu’il a su reconnaitre la valeur de la perle. Une perle à l’époque du Christ, c’est encore plus précieux l’or.
Pour comprendre en profondeur cette parabole, il faut sans doute se laisser enseigner d’abord par la nature. (La perle en grec se dit margarites d’où le prénom que nous connaissons !). D’où vient la perle ? D’un accident de parcours dans la vie d’un mollusque, d’un coquillage. C’est un hôte indésirable, un intrus qui se faufile dans le coquillage et que le mollusque va rendre prisonnier en sécrétant tout autour ce qui au fil du temps forme cette nacre blanche de grande pureté et d’une forme parfaite.
2 interprétations sont possibles à partir de là :
La perle, c’est le Christ pour lequel il vaut la peine de tout perdre. C’est généralement le commentaire classique qui est donné.
Personnellement je soutiendrais volontiers une autre interprétation : la perle, c’est nous aussi. Par notre condition de pécheur, nous sommes comme des intrus dans le Royaume des Cieux mais le Seigneur nous a enveloppé de sa miséricorde infinie jusqu’à devenir en son sein cette perle qu’il s’est acquise au prix de son sang. A chaque pardon reçu de Lui, une couche de nacre vient se poser sur nous. Le Seigneur ne cesse de nous redire « Tu as du prix à mes yeux et je t’aime ».
C’est ce que nous allons nous redire les unes aux autres alors que je vais faire l’appel des membres du chapitre. Quand je vous appelle, vous irez prendre un coquillage. Dedans vous trouverez le nom d’un sœur avec sa perle et vous irez le lui porter.
Le petit coquillage que vous avez reçu ressemble à une mini coquille de S Jacques. Il est le symbole du pèlerin en marche. Sa forme creuse nous rappelle l’attitude d’accueil, d’écoute que nous devons avoir les unes envers les autres. Les stries qui convergent vers leur point d’attache, sont le signe de l’unité que nous voulons témoigner tout en respectant la ligne que chacune trace par sa propre vie, de notre recherche de convergence dans une direction cherchée ensemble.
Sr Marie Jean Mouton-Brady