Commentaire des lectures du jour - Mercredi 5 avril 2023 - Rabbi, serait-ce moi ?

Lectures :
Is 50,4-9a
Ps 68, 8-10. 21-22. 31.33-34
Mt 26,14-25

Le Seigneur vient à mon aide.

Nous sommes à la veille du Triduum Pascal, dans lequel nous allons célébrer, de nouveau, le mystère de la passion, de la mort et de la résurrection de Jésus. Et les lectures de l’eucharistie d’aujourd’hui nous introduisent déjà dans l’atmosphère respirée tout autour.

La première lecture nous offre le quatrième chant du poème du Serviteur de Yahvé, du livre d’Isaïe. Avec de nombreuses interprétations possibles et valables, l’Église n’a pas hésité à appliquer à Jésus ces chants du Serviteur.

C’est que Jésus est le Serviteur par excellence. Il a découvert la mission que le Père lui confie et sa décision de la mettre en œuvre se maintient intacte à tout moment. Cela crée, sans remède, un problème car le Dieu et le Royaume que Jésus annonce ne sont pas compatibles avec les croyances, les pratiques et les intérêts religieux et politiques de son temps.

Il est paradoxal que quelqu’un qui « est passé en faisant le bien », en offrant guérison, salut, nouvelles opportunités, reconnaissance, proximité… reçoive comme réponse ce que nous écoutons aujourd’hui dans le chant du Serviteur de Yahvé.

Il y a un message de la part de Dieu que ce monde (comme le nôtre ?) n’était pas disposé à recevoir. Et cela a comme conséquence d’anéantir le messager. Jésus sait, au plus profond de son être que le Seigneur est avec lui, et c’est la seule force qui le soutienne.

De manière déconcertante, celui qui échoue va être celui qui triomphe. Cette finale « heureuse » ne devrait pas nous faire oublier ce que son engagement pour le Royaume de Dieu a signifié pour Jésus. Peut-être pouvons-nous ainsi entrevoir que suivre Jésus ne semble pas compatible avec une vie tranquille, paisible, heureuse, sans problème… ce qui nous plairait peut-être à tous, et cependant ne semble pas être synonyme de bonheur ni de vie en plénitude, si nous regardons Jésus.

« Rabbi, serait-ce moi ? »

Une histoire, celle de l’évangile d’aujourd’hui, que nous préférons sûrement regarder de « l’extérieur ». Ce récit est très fort pour nous laisser toucher par lui intérieurement. C’est peut-être pour cela qu’au long de l’histoire tant d’hypothèses ont été émises à propos de la personne de Judas. A partir d’un regard extérieur, nous pouvons sentir le même étonnement que dans la première lecture devant le traitement infligé à Jésus.

Judas a vécu trois ans avec lui, et non seulement il n’a rien compris (les autres apôtres non plus), mais il n’attend plus rien du projet de Jésus. Il vaut mieux en finir tout de suite. Il considérait peut-être qu’il avait, lui, une vision plus ajustée de la réalité et de la manière de l’affronter… le fait définitif est qu’il le trahit et le livre. Nous ne pouvons pas entrer dans le mystère de la vie de Judas.
Mais nous pouvons et devons entrer dans notre propre mystère personnel, et nous poser à fond la même question que celle des disciples à la Cène : « Serait-ce moi, Seigneur ?

Notre désir est de le suivre, mais n’y aura-t-il pas des moments, des attitudes, des actions ou des omissions qui signifient que nous le trahissons, que nous tournons le dos, que nous nous passons de lui ? C’est arrivé à tous ceux qui l’accompagnaient à la Cène. Le danger, la peur, la fragilité humaine… Nous ne sommes pas différents.

Mais ce que nous avons toujours, c’est la possibilité de « revenir », de le rencontrer à nouveau, de demander pardon… Jésus nous a montré un Dieu qui est toujours là, qui nous attend toujours, qui nous offre toujours une nouvelle opportunité. Voilà notre grande chance !

Sr Gotzone Mezo Arancibia